ENTRETIEN AVEC NOTRE VICE-PRÉSIDENTE EXÉCUTIVE FINANCE ET TECH
HÉLÈNE DE TISSOT
Pernod Ricard a une nouvelle fois fait preuve de résilience, de discipline et de conviction stratégique. Nous avons réagi avec une grande agilité, au cours d’une année difficile pour l’industrie des spiritueux confrontée à des défis géopolitiques hors normes et à une confiance du consommateur en berne dans certains marchés. Notre chiffre d’affaires a baissé de - 3 % et nos volumes, en croissance pour le troisième semestre consécutif, ont progressé de + 2 %. Nous sommes parvenus à dégager une marge opérationnelle organique en progression de 64 points de base, grâce notamment aux mesures d’efficacités opérationnelles que nous avons prises, sans pour autant sacrifier les investissements dans nos marques. Nous avons maintenu ou gagné des parts de marché dans 12 de nos 17 marchés les plus importants.
Comment décririez-vous la performance financière de Pernod Ricard en 2024/25 ?
Pernod Ricard a fait face aux vents contraires avec résilience et agilité, réalisant un chiffre d’affaires en baisse organique de - 3 %. L’environnement a été très difficile - pour des raisons différentes - dans trois de nos marchés clés. Aux Etats-Unis, notre premier marché en termes de chiffre d’affaires, la reprise se poursuit et le marché se rapproche de sa tendance normative de long terme, tandis que Pernod Ricard continue de réduire l’écart par rapport au marché. La Chine demeure impactée par une faible consommation et le Global Travel Retail a été perturbé par la suspension du cognac dans les réseaux de duty free en Chine. La présence géographique de Pernod Ricard, à la fois étendue et équilibrée, a permis de limiter l’impact de ces éléments négatifs et nos ventes organiques ont progressé de + 1 % en dehors de ces trois marchés. Nos résultats en Inde sont particulièrement remarquables. Notre croissance y reste forte et l’Inde est devenue notre deuxième marché par le chiffre d’affaires, devant la Chine. Nous avons une nouvelle fois dégagé une marge opérationnelle organique en hausse. Nous avons mis en place des mesures de Revenue Growth Management permettant de soutenir les ventes, nous avons poursuivi nos mesures de réductions des coûts et avons dégagé 900 millions d’euros d’efficacités opérationnelles entre 2022/23 et 2024/25.
Nous avons également mis en place une discipline stricte en matière de dépenses. Compte-tenu des conditions de marché difficiles dans certains pays, nous avons également piloté avec agilité nos frais publi-promotionnels, en privilégiant les investissements marketing là où le retour sur investissement était le plus intéressant et en diminuant ces investissements là où les conditions de marché le nécessitaient, comme en Chine. Une amélioration sensible de notre génération de cash a permis de dégager un Free Cash Flow d’environ 1,1 milliard d’euros, reflétant une baisse du résultat opérationnel courant, une amélioration du besoin en fonds de roulement et une réduction des investissements en Capex et en stocks stratégiques après les montants d’investissements records atteints en 2023/24.
Au 1er semestre, vous avez modifié vos perspectives à moyen terme, cela signifie-t-il que vous avez moins confiance dans l’avenir de votre industrie ?
Nous avons indiqué, lors de la publication de nos résultats semestriels, que nous allions faire face aux difficultés cycliques de notre industrie avec résilience et agilité. L’environnement macroéconomique est difficile et le marché des spiritueux fait face à des incertitudes géopolitiques extrêmement grandes, notamment en matière de droits de douane. Cela nous a conduit à réactualiser nos perspectives pour les années à venir. Nous nous attendons à un exercice 2025/26 de transition avec une amélioration des tendances de nos ventes organiques par rapport à 2024/25. Nous porterons aussi une attention particulière à la préservation de notre marge opérationnelle organique, dans toute la mesure du possible. Pour les années 2026/27 à 2028/29, nous anticipons une croissance plus dynamique de nos ventes organiques, dans une fourchette de + 3 % à + 6 % en moyenne annuelle, et une progression de notre marge opérationnelle organique. Nous avons également annoncé notre intention de poursuive notre programme d’efficacités opérationnelles, avec l’optimisation de nos opérations et la simplification de notre organisation. Nous restons résolument confiants dans la dynamique de long terme du marché mondial des spiritueux, avec notamment la croissance de la population mondiale en âge légal de consommer de l’alcool, la progression des classes moyennes-supérieures, en particulier en Inde et en Chine, le rôle des femmes, qui sont de plus en plus nombreuses à profiter de moments de convivialité, et la premiumisation, notamment dans les marchés émergents.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre programme d’efficacités opérationnelles ?
Nous avons une double approche, qui consiste à mieux tirer parti, pour nos opérations, de notre échelle mondiale, et à s’armer face aux défis à venir grâce à notre organisation « Fit for Future » fondée sur la simplification, l’empowerment et la discipline. Nous avons déjà réalisé environ 900 millions d’euros d’efficacités opérationnelles entre 2022/23 et 2024/25 et nous ambitionnons de parvenir à environ 1,0 milliard d’euros supplémentaires entre 2025/26 et 2028/29. En ce qui concerne nos opérations, nous tirons parti de notre échelle mondiale dans les approvisionnements, la production et la logistique, ce qui nous permet de réduire les coûts et les niveaux de stocks, et d’améliorer notre efficacité. Notre réorganisation « Fit for Future » a quant à elle débuté en 2022/23 avec la constitution de 10 nouvelles entités de gestion (management entities) et le regroupement de nos alcools blancs au sein de The Absolut Group.
Quelles sont les perspectives pour 2025/26 ?
L’année 2025/26 devrait être un exercice de transition, avec une amélioration des tendances de nos ventes, en données organiques, dans un environnement toujours difficile. Nous nous concentrons sur ce que nous pouvons contrôler. Nous poursuivons donc la mise en place de notre organisation « Fit for Future », nos mesures d’efficacités opérationnelles et nos investissements dans nos marques. Nous restons concentrés sur la génération de cash et attendons une amélioration de notre ratio de conversion avec des investissements stratégiques en Capex et en stocks d’eaux-de-vie à vieillissement inférieurs à 900 millions d’euros.